La journée avait été longue, mes jambes semblaient peser plusieurs tonnes. Arpenter sans arrêts les allées de la Bibliothèque, que ce soit pour ranger, réparer, ou apporter des renseignement à un Phantom, je crois bien n'avoir même pas eut un moment pour aller au petit coin. Ni même pour me prendre un petit café. Oui, une journée difficile. Mais productive, et ma fatigue n'entamait en rien mon bonheur d'avoir put être utile à mes collègues, ou même à l'agence tout simplement.
Quelle employée modèle, ah... Modèle, et complètement lessivée, surtout.
Je pensais déjà à mon lit, si doux, grand et avec ce matelas moelleux ! Je pressais donc le pas, j'étais déjà dans l'Hansel District quand la nuit commençait à tomber. Juste un instant, le ciel se teintait d'un rose-orangé, une étrange couleur mais tellement apaisant. On pouvait même voir les étoiles, les plus grandes, commencer à briller, si on étirait légèrement le cou pour les observer. C'était un spectacle auquel j'assistais quasiment chaque soir en rentrant, pourtant je ne m'en lassait pas. Il m'évoquait tellement de souvenir.
Je suis bien trop sentimentale par moment. Je passai alors les quelques livres que j'avais emmener avec moi ( en partie des livres d'histoires, normalement on les distribue pour les étudiants, mais j'avais été trop curieuse ... ).
Mes yeux se reposèrent donc sur les rues bétonnées du quartier. Quelques rues plus loin, je pouvais retrouver mon appartement, ainsi que son calme olympien qui y régnait. Rien n'y traînait, je crois bien que le temps m'avait rendue maniaque.

Un peu plus loin, les bars commençaient à se vider d'une partie de leur clientèle. D'autres, en revanche, se voyait envahit de clients. Certains avaient l'air d'apprécier l'obscurité plus que d'autre. Mais dans un sens, c'était compréhensible : La nuit avait beau être un moment agréable, calme, certains ne voulaient pas courir de risque. L'Hansel District avait beau être un quartier réputé surtout pour regrouper beaucoup de monde et être agréable, il ne fallait pas oublier l'ombre au tableau. Certains criminels y traînaient, pas grand chose généralement. Des dealers, des pickpocket ou des casseurs. Mais on ne les croisaient pas à tout les coins de rue, de toute façon le grand nombre d'habitant s'entraidant limite les agressions.
De mon côté, j'avais apprit à cohabiter avec ces problèmes bien avant de rejoindre Sweetdreams. Ici, je n'avais pas été dépayser des rues allemandes, si on oublie les incarnations qui ne se dissimulent pas toujours.

Très vite j'arrivai à proximité de mon domicile, longeant un parc dans lequel se promenait encore des couples, des chiens et leur maître, la plupart rentrant chez eux dans cette fin de soirée, quand quelque chose, ou plutôt quelqu'un attira mon attention.
Enfin, c'était surtout ce qui se passa juste après avoir posé mes yeux sur cette personne. Deux longues ailes apparurent alors dans le dos de la personne que je fixais, quelques plumes volèrent autour d'elle. Elles étaient agitée par la légère brise qui soufflait, une superbe image que je garderai en tête pendant un long moment. Les plumes solitaires finirent ensuite par toute retomber au sol.
Absorbée par cette scène, j'en avais oublié mes livres qui tombèrent au sol, dévoilant leurs pages. Je pestai alors, légèrement vexée de me laisser distraire si facilement. Et d'avoir, au passage, abîmé des livres que j'avais à peine feuilleté. D'un geste vif, je me baissai pour les ramasser, remettant à leurs places quelques mèches de cheveux.

Mes bras se retrouvaient à nouveau à supporter ma petites piles de livres, que j'inspectais déjà minutieusement. La couverture ne semblait pas abîmée, quoique l'un d'eux avait le rebord légèrement retroussé. Je me mordis la lèvre inférieure, tracassée par cette faute. Heureusement, il ne s'agissait en aucun cas d'un livre de la Bibliothèque, mais d'un ouvrage que j'avais acheté la veille et déjà bien entamé. Ce n'était pourtant pas l'argent qui m'inquiétais dans le cas présent - enfin un peu quand même - mais abîmer quelque chose, en particulier un livre, avait le don de m'irriter.

Une présence très proche me sortit alors de mes pensées : L'Incarnation venait de se rapprocher sans que j'y ai fait attention. Ses lèvres bougèrent, mais aucun son ne sortit. Était-elle muette ? Je ne souffrais d'aucun problème d'audition pourtant. Et même si les mots n'avaient pas été prononcés, j'avais bien compris ce que l'Incarnation demandait. Un simple " ça va ", enfin je supposes. Je n'avais jamais rencontré de muet avant, et je doutais d'être très douée pour lire sur les lèvres...
Je pouvais désormais analyser plus en détail les traits de son visage, ses grands yeux rouges s'opposaient étonnamment aux miens d'un bleu profond. Encadrant son visage, de courtes mèches de cheveux blanches comme la neige, une teinture et des lentilles ? Peut-être, ou bien cette femme était albinos sans doute. De toute façon, son teint n'était pas ce qui attirait le plus mon attention. Abritées derrière son corps, deux ailes trônaient et retombaient derrière elle. Toute aussi blanches que ses cheveux, la jeune femme prenaient une allure presque... Magique. Une Incarnation, en somme, pourtant je restais toujours fascinée par son apparence. Et cela me donnait bien l'air d'une touriste.
Je me releva alors précipitamment, dépassant désormais sans problème la jeune femme. Rien d'étonnant, je n'étais pas connue pour être quelqu'un de très petit...
Assez mal à l'aise, je commençais déjà par m'excuser.

- Désolée de... De vous avoir regarder ainsi. Je suis toujours fascinée par les Incarnations et... Fascinée, évidemment le mauvais mot ! De quoi la rapprocher d'un rat de laboratoire, d'un sujet d’expérience, d'un être mythique... De quelque chose d'anormal. Enfin je veux dire... Pas que cela me gêne de rencontrer une Incarnation...

Pourquoi est-ce que je ne pouvais pas être aussi à l'aise en public qu'à mon travail ? A la Bibliothèque j'effectuais mes tâches sans soucis, je pouvais même faire taire un collègue récalcitrant sans problème... Pourtant, ici et maintenant, je me retrouvais presque démunie, mal à l'aise au possible.
J'essayais donc de ne rien laisser paraître, de garder un air sincère et calme envers l'Incarnation, en espérant ne pas aggraver la situation, ou la blesser tout simplement.

(désolée du retard immonde et puant)